
Enseignement public des faits religieux en Europe : même nécessité, obstacles variés
Les 13 et 14 mars dernier, Renaud Rochette s’est rendu à Koper (Slovénie) pour le symposium annuel du groupe de travail sur les religions dans les systèmes éducatifs publics de l’EASR (European Association for the Study of Religions), organisé par Karna Kjeldsen (Collège universitaire Absalon, Roskilde) et Aleš Črnič (Université de Ljubljana).

Des chercheurs du Centre de recherche scientifique de Koper, qui accueillait le symposium, nous ont présenté leurs recherches. Gašper Mithans et Mateja Režek ont présenté le remplacement de l’éducation religieuse dans la Yougoslavie communiste, qui explique que de nos jours la religion n’ait guère de place, y compris comme sujet d’étude, dans les écoles publiques en Slovénie. Nadja Furlan Štante a monté l’intérêt d’intérêt des approches féministes dans un domaine où les sources disponibles sont très fortement genrées.
L’essentiel des contributions a porté sur les attendus de l’étude des religions à l’école.
Fredrik Jahnke (Université de Gävle) est revenu sur la notion d’alphabétisme religieux (religious literacy), qui est mouvante et passe-partout, un signifiant vide dont l’usage varie, qui peut décrire la compréhension de sa religion (éducation religieuse) ou la compréhension des phénomènes religieux en général (enseignement des faits religieux).
Patrick Loobuyck (Université d’Anvers) a montré comment l’étude du rapport entre science et religion est révélatrice de l’équilibre délicat qui s’instaure à l’école entre prise en compte du plurialisme convictionnel et promotion de la pensée critique.
Frederik Wallenstein (Université de Stockholm) est revenu sur la mise en œuvre de l’étude de ce rapport dans les nouveaux programmes scolaires suédois, entre l’ambition affichée (comment les convictions influencent la société et comment elles évoluent avec la société) et la faiblesse du temps disponible, qui conduit à traiter du rapport entre science et croyance, essentiellement avec la question de la théorie de l’évolution.
Giovanni Lapis (Université Ca’ Foscari, Venise) a expliqué le mouvement de déconfessionnalisation qui est en cours dans le Cours de religion catholique dans les écoles italiennes, qui est supposé être ouvert sur les autres religions mais considéré comme trop sous le contrôle de l’Église catholique (recrutement et surveillance des professeurs): les professeurs souhaiteraient être des professeurs comme les autres, et des universitaires appellent à profiter de l’ouverture affichée pour faire de l’enseignement des faits religieux.
Christian Moe (chercheur indépendant) a présenté de manière critique le cas d’un projet européen, EDUC8, dont l’objectif est de lutter contre la radicalisation grâce à l’enseignement religieux pour faire comprendre aux élèves quelle était la bonne manière de pratiquer sa religion. La discussion a montré un scepticisme général sur ce type d’approche.
Le symposium s’est terminé par une table ronde ouverte avec Wanda Alberts (Université de Hanovre), Jenny Berglund (Université de Stockholm), Aleš Črnič (Université de Ljubljana) et Tim Jensen (Université du Danemark du Sud) consacrée à l’importance d’un enseignement scientifique des religions/enseignement des faits religieux, non seulement à l’école mains dans tous les secteurs de la société, avec ce paradoxe d’une nécessité constatée par les acteurs de terrain, mais d’un manque d’action de la part des décideurs, pour des raisons spécifiques à chaque pays. Lors de la discussion, Renaud Rochette a pu évoquer la situation en France qui, en définitive, n’a rien d’original.