Sommaire

Résumé

L’auteur propose ici une étude sur la nature, la sphère d’action et la signification des dieux et du divin en général dans l’Égypte antique. La question de fond traitée dans l’ouvrage est le réexamen critique d’une théorie souvent énoncée selon laquelle les théologiens de l’Égypte ancienne auraient été les précurseurs d’une conception monothéiste du divin : les Égyptiens lettrés croyaient-ils en l’unicité du divin au-delà d’un apparent polythéisme ? L’intérêt majeur de ce livre est de montrer avec rigueur que la réponse à cette question n’est pas simple. Elle passe tout d’abord par l’étude de la conception que les anciens Égyptiens se faisaient des dieux dans leur pluralité, à travers la terminologie, les symboles et les signes hiéroglyphiques utilisés pour désigner les divinités, leurs noms, leurs fonctions et leur nature respectives. La multiplicité des noms donnés au même dieu, la hiérarchie de ces noms et l’existence de noms cachés sont autant d’indices révélateurs de l’idée que les Égyptiens se faisaient du divin dans sa complexité. La définition des divinités témoigne d’une grande fluidité : elles s’interpénètrent et se combinent sans s’influencer profondément. Cependant, cette forme de syncrétisme qui crée perpétuellement de nouvelles divinités par cette combinatoire, comme Amon-Ré, « ne renferme aucune tendance monothéiste » ; il se fait et se défait en un instant, le temps d’un rite ou d’une prière, par exemple. L’étude des manifestations et des représentations du divin, notamment zoomorphiques, montre que celles-ci véhiculent des images des dieux, mais en aucun cas elles ne révèlent leurs formes véritables. Par leurs caractéristiques récurrentes on voit que les dieux sont mortels, mais liés à un cycle de régénération quotidienne ; leurs pouvoirs sont immenses, mais limités, notamment dans l’espace comme en témoignent les nombreuses manifestations locales d’une même divinité.

Quant à l’unicité du divin, l’auteur la définit à travers sa description du « non existant », situés à l’extérieur et autour de l’existant, et dans lequel les dieux trouvent leur source. L’émergence d’un être suprême dans le panthéon égyptien vers la fin de l’Ancien Empire est une manifestation caractéristique d’hénothéisme : même si ce dieu souverain se reconnaît le plus souvent dans le dieu solaire Ré, les qualités d’un être suprême, créateur et protecteur de « tout ce qui existe » peuvent être attribuées à n’importe quelle divinité particulière. L’épisode du monothéisme solaire d’Akhenaton fait l’objet d’une « digression » remarquable de finesse dans l’appréciation de l’action réformatrice de ce souverain. Nullement visionnaire, selon l’auteur, mais « rationaliste radical », il chercha à imposer un culte exclusif en renonçant à toute représentation mythique du divin et en plaçant le roi comme unique prophète du dieu. Pour conclure, l’auteur met en évidence la complexité de la pensée égyptienne qui accepte à la fois le Un et le Multiple dans une complémentarité qui n’est pas toujours accessible à l’esprit occidental non exercé. De plus la fluidité de la conception du divin dans l’Égypte antique ne permet pas de définition stricte de ce qu’est un dieu.

Points forts

• Étude riche et complète, s’appuyant sur de nombreux exemples, et définissant de façon précise la complexité de la conception du divin en Égypte ancienne, trop souvent considéré comme un simple polythéisme.

• Les parallèles et comparaisons avec d’autres polythéismes contemporains (grecs, hindous).

• Explication claire de la méthode d’analyse.

ML