Sommaire
Résumé
Au XIXe siècle, l’Église catholique romaine traverse une période de renouveau après les persécutions subies sous la Révolution. Ce renouveau s’articule entre projet de restauration de la monarchie et une adaptation à la modernité politique et économique. La force de l’ultramontanisme intransigeant (opposé au gallicanisme) est qu’il donne l’impression qu’il incarne la seule loyauté possible vis-à-vis de l’Église catholique romaine, bien qu’il ne représente pas le courant majoritaire dans cette Église. Cette situation contribue à souder les clans, cléricalisme d’un côté, anticléricalisme de l’autre.
Dans les différents discours anticléricaux, sont critiqués : le mode d’organisation de l’Église, semblant incompatible avec le régime républicain ; l’immoralité supposée du clergé ; l’enseignement considéré comme dogmatique de l’Église catholique romaine.
Le conflit entre cléricaux et anticléricaux est prégnant et la victoire des républicains en 1879 est une surprise. La troisième République met en place de nombreuses mesures de laïcisation, particulièrement dans l’enseignement : laïcisation des programmes en 1882 et des personnels en 1886, à rapprocher de l’expulsion des Jésuites (et des congrégations enseignantes non autorisées) dès 1880. L’anticléricalisme sert de ciment aux républicains de gouvernement.
Face à cet anticléricalisme, la position catholique se durcit et l’antimaçonnisme répond à l’anticléricalisme. République et Église sont vécues comme antithétiques, incompatibles. La séparation de l’Église et de l’État, dont on commence à parler, est perçue par les catholiques comme ferment de dissolution de la foi, alors que le Concordat, pourtant si difficile à vivre sous un régime anticlérical républicain, reste encore perçu comme la condition d’épanouissement de cette même foi.
C’est dans ce contexte qu’advient la loi de séparation. La commission de préparation de la loi fait un travail minutieux, et écarte les projets jugés trop anticléricaux, comme celui du président du Conseil, Émile Combes. Aristide Briand, rapporteur de la commission et défenseur du projet de loi, cherche les compromis, parfois en allant dans un sens favorable à l’Église catholique romaine (liberté de rassemblement et d’organisation, article 4 de la loi qui reconnaît « les principes d’organisation » de la religion concernée), parfois dans un sens plus favorable aux anticléricaux (suppression du budget des cultes, Conseil d’État juge en dernier recours). La loi votée le 9 décembre 1905 n’est donc ni complètement libérale, ni complètement anticléricale.
Sitôt la loi votée, les catholiques se préparent à la résistance, échaudés par le précédent de la loi de 1901 (appliquée de manière plutôt anticléricale par Combes). Les inventaires prévus à l’article 3 de la loi de 1905 sont vécus comme une manifestation d’oppression pour certains catholiques, mais le gouvernement choisit la fermeté pour ne pas laisser la loi inappliquée.
Aux élections législatives de 1906, le cartel des gauches est réélu et désormais, tant le gouvernement que le Conseil d’État jouent un rôle d’apaisement et interprètent la loi de 1905 de manière libérale, effaçant peu à peu la crainte des catholiques que la loi soit interprétée dans un sens défavorable aux « libertés de l’Église ».
La loi garantit une réelle liberté religieuse, et ne reconnaît plus de cultes. Après une centaine d’années d’application, cette loi fait partie des « fondamentaux » de la République, au point d’être à son tour sacralisée par certains courants de pensée au XXIe siècle. Il convient de la replacer dans son contexte et de la prendre pour ce qu’elle est, ni libération soudaine de l’État, ni persécution radicale de l’Église romaine, mais jalon important dans l’histoire de la laïcité à la française.
Points forts
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L’auteur analyse la perception populaire de ces événements telle qu’on peut la reconstituer à partir des archives, ce qui apporte un éclairage différent et nouveau sur les faits par rapport aux études historiques habituelles.
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L’ouvrage est très documenté, précis, et avance méthodiquement dans sa démonstration.
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Les pistes de réflexion ouvertes par le dernier chapitre sont nombreuses et très intéressantes.
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La bibliographie est complète, les annexes en général très utiles.
Usage dans les programmes scolaires
Classe |
Discipline |
Thèmes du programme |
Sixième |
Éducation civique |
La laïcité dans l'éducation |
Quatrième |
Éducation civique |
Les droits de l'homme et l'Europe : laïcité et identités nationales |
Quatrième |
Histoire |
La philosophie des lumières et la laïcisation de la société |
Troisième |
Éducation civique |
Valeurs, principes et symboles de la République (loi de 1905) |
Seconde |
Éducation civique |
Citoyenneté et intégration |
Première |
Éducation civique |
Exercice de la citoyenneté, République et particularismes (lois de la laïcité, garantie à l'égale dignité des personnes) |
Première |
Histoire |
Relations entre les églises et le monde moderne : le catholicisme, entre acceptation et refus |
M.A.
Domaines religieux : Europe et religions : France, Christianisme, Laïcité, Christianisme : Politique et société, Christianisme : Doctrines et courants : Église catholique, Christianisme : Politique et société : Relations avec l’État, Laïcité : Généralités, Laïcité : Généralités, Laïcité : Corpus juridique
Guide des ressources : Recherche : Ouvrages
Référence du document
Recension : « Arnera Matthieu, Grévy Jérôme, GRÉVY Jérôme, Le cléricalisme ? Voilà l’ennemi ! Un siècle de guerre de religion en France, Paris, Armand Colin, Les enjeux de l’histoire, 2005, 248 p. » 2008, , IESR - Institut d'étude des religions et de la laïcité , mis à jour le: 12/16/2016, URL : https://irel.ephe.psl.eu/ressources-pedagogiques/comptes-rendus-ouvrages/grevy-jerome-clericalisme-voila-lennemi-siecle