Traduction de l’allemand et introduction de Jean Lauxerois et Claude Roëls, prélude de Friedrich Georg Jünger
Sommaire
Résumé
L’objectif poursuivi par Walter Otto dans cet ouvrage est annoncé dès le titre : theophania ou « l’apparition du dieu ». En effet, il s’agit pour lui « de faire apparaître à la lumière l’esprit de la religion grecque », sa spécificité, c’est-à-dire de combler le fossé cognitif qui sépare notre société judéo-chrétienne d’une société grecque polythéiste et adogmatique.
L’auteur expose sa thèse de manière claire dans deux grandes parties précédées d’une introduction, subdivisées chacune en plusieurs sous-parties annoncées par un titre synthétique.
Dans l’introduction, l’auteur s’emploie à détruire méthodiquement les préjugés de son temps concernant la religion grecque. Si les dieux grecs nous touchent toujours, à travers l’art notamment, la connaissance que nous en avons est extérieure et erronée, altérée par plusieurs filtres culturels :
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celui du monothéisme judéo-chrétien qui considère avec méfiance et mépris les religions polythéistes ;
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celui de l’esthétisme des Lumières et du classicisme allemand, qui ne considèrent les figures et les mythes grecs que sous l’angle de leur beauté et de leur richesse ;
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celui de la science positiviste, qui ne voit dans la religion grecque et ses mythes que le stade primitif d’une pensée humaine appelée à évoluer ;
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celui enfin de la « psychologie des profondeurs » qui détourne le sens symbolique des mythes, interprétés non plus comme une clé de compréhension du monde, mais comme un moyen d’introspection individuelle.
De fait, pour apprécier la religion grecque dans toute sa spécificité, il nous manque l’expérience des dieux grecs, c’est-à-dire une connaissance subjective de ceux-ci.
Dans la première partie, l’auteur démontre que si les dieux grecs constituent toujours de nos jours des référents, c’est parce que leur être même, sans s’appuyer sur aucun dogme, exprime « l’essentiel et le grand », et représente une sérénité éternelle, qui bien que distante, est omniprésente et donc familière et consolatrice pour l’homme. En ce sens, tous les faits, grands événements comme simples actes quotidiens, sont des manifestations du divin : « les dieux se manifestent dans ce qui anime l’homme au plus intime ». Cette perception de la divinité engage une conscience morale et religieuse tout à fait différente de la nôtre.
Dans la seconde partie, l’auteur. se fait plus précis et tente de définir ce qui constitue le rapport des Grecs à leurs dieux. Pour ce faire, il inventorie quelques-uns des principaux concepts qui font la religion grecque (félicité, pudeur/aïdos, grâce/charis, unité et pluralité divines…), ainsi que les divinités essentielles du panthéon (Zeus, Aphrodite, Artémis, Apollon, Athéna, Dionysos…).
Points forts
Cet ouvrage a le mérite de présenter clairement les aspects essentiels du « croire » grec, en insistant nettement sur ce qui le distingue de la foi judéo-chrétienne avec laquelle le lecteur est a priori plus familier.
Il constitue un complément utile à la lecture d’historiens des religions plus contemporains tels que Jean-Pierre Vernant ou Pierre Vidal-Naquet.
J.B.
Domaines religieux : Polythéismes antiques, Polythéismes antiques : Religions de la Grèce et de l’Égée
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Référence du document
Recension : « Otto Walter Friedrich, Braesch Judith, OTTO Walter Friedrich, L’Esprit de la religion grecque ancienne. Theophania, Agora, Paris, Pocket, 1995, 187 p. » 2009, , IESR - Institut d'étude des religions et de la laïcité , mis à jour le: 12/16/2016, URL : https://irel.ephe.psl.eu/ressources-pedagogiques/comptes-rendus-ouvrages/otto-walter-friedrich-lesprit-religion-grecque