Sources et bibliographie ; dix-sept photographies, trois graphiques, neuf documents, onze cartes, un plan in texto ou en annexes ; index des noms de personnes.
Sommaire
Résumé
À l’été 1325, une commission d’enquête envoyée par le pape recueillit les témoignages des habitants de cinq villes de la Marche d’Ancône en vue de la canonisation éventuelle de Nicolas de Tolentino, religieux de l’ordre des Ermites de Saint-Augustin (1245-1305). Le procès-verbal qui en a résulté est au cœur du travail de l’auteur, dont l’objectif est de faire surgir, par la « déconstruction intégrale » (p. 6) de cette source documentaire, la société dont elle constitue « la seule présence réelle du passé qui nous reste » (p. 8). Le cheminement se fait en sept parties comprenant au total dix-neuf chapitres.
Le premier volet s’interroge sur ceux qui obtinrent de Jean XXII le déclenchement d’une procédure inquisitoire — un ordre religieux en quête d’un saint fondateur pour asseoir sa légitimité et les principaux dirigeants politiques et ecclésiastiques locaux, favorables au parti des Guelfes —, mais aussi sur l’identité de Nicolas, cité dans aucune autre source que celles de son procès de canonisation. Une première conclusion s’impose : la sainteté a été créée ici par l’enquête, qui n’a donc pas constitué un aboutissement mais au contraire le déclencheur d’un mécanisme consistant à « fabriquer un saint », titre de la seconde partie. Celle-ci trace le profil d’un pasteur ascète opposé aux Gibelins et chasseur de démons, adepte d’une pauvreté modérée à l’âge de la répression des apôtres du dénuement extrême ; bref, d’un personnage qui avait « toutes les vertus requises pour être un saint des années 1320 » (p. 121). Le troisième volet focalise donc sur la procédure visant à établir la fama (« renommée ») de la sainteté. Les divergences entre la liste des personnes citées à comparaître et celle des témoins dont la déposition fut finalement enregistrée témoignent d’une sélection — selon le sexe, l’âge, le milieu social — que la quatrième partie s’attache à éclairer. L’auteur scrute ensuite le passage, à travers différents filtres, de la parole prononcée en langue vulgaire au témoignage normalisé en latin, dans un cinquième volet dont le thème central est la mémoire, notamment celle du temps et des lieux. Telle qu’elle est accessible à l’historien dans le document écrit, il s’est agi d’une mémoire collective instrumentalisée au profit de la canonisation de Nicolas, certes, mais aussi de la domination sociale de ceux qui menèrent l’affaire. Ce dernier aspect clôt l’étude et montre, études lexicales et statistiques à l’appui, combien Ermites de Saint-Augustin et notables de Tolentino ont su utiliser les trois mois de l’enquête pour produire ou reproduire des différences, des inégalités, des hiérarchies et les faire valider par l’institution pontificale. Mais auparavant, l’auteur a récolté toutes les mentions de lieux faites dans les 371 dépositions afin de tracer les espaces du procès : celui de la commission, celui des témoins et enfin celui de Tolentino, « investi d’une charge de sacré croissant à mesure que l’on s’approche du corps de Nicolas » (p. 273).
Points forts
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Le parti-pris méthodologique, qui est en lui-même l’autre sujet du livre. Reprenant le propos récent de l’historien Jean-Michel Sallmann, l’auteur entend « soumettre le catholicisme au droit commun de la recherche historique » (p. 4) et considérer le procès de canonisation de la même manière et avec les mêmes outils que n’importe quel autre document.
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La présentation de la procédure (IIIe Partie) menant à la « fabrique d’un saint », qui comprenait en particulier la formulation d’un interrogatoire des témoins divisé en articles, schéma rigide permettant de définir et de contrôler l’image que l’on voulait donner du saint.
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Une pièce à ajouter au vaste dossier des témoins et des témoignages, qui font actuellement l’objet d’un vif intérêt dans l’ensemble des sciences humaines.
Utilisation possible dans les programmes scolaires
Classe |
Discipline |
Thèmes du programme |
Cinquième |
Histoire |
L’Église en tant qu’acteur essentiel de la Chrétienté occidentale médiévale (Moyen Âge) |
Première |
Espagnol |
Rôle politique et éducatif de l’Église |
Terminale |
Espagnol |
Facteurs de cohésion : la religion catholique |
LV
Domaines religieux : Christianisme, Christianisme : Origines et corpus : Théologie, Christianisme : Rites et pratiques : Clergé, Christianisme : Doctrines et courants : Église catholique, Christianisme : Période : Moyen Age, Christianisme : Rites et pratiques : Monachisme
Guide des ressources : Recherche : Ouvrages
Référence du document
Recension : « Viallet Ludovic, Lett Didier, LETT Didier, Un procès de canonisation au Moyen Âge. Essai d’histoire sociale. Nicolas de Tolentino, 1325, Paris : Presses Universitaires de France, Le nœud gordien, 2008, 473 p. » 2008, , IESR - Institut d'étude des religions et de la laïcité , mis à jour le: 12/16/2016, URL : https://irel.ephe.psl.eu/ressources-pedagogiques/comptes-rendus-ouvrages/lett-didier-proces-canonisation-au-moyen-age-essai