Sommaire

Résumé

Ce petit essai très dense, et érudit, dresse un bilan des questions en débat autour du Coran, du point de vue scientifique et historiographique. Malgré la qualité de traductions du Coran disponibles en français, l’auteur a préféré traduire lui-même les versets qu’il cite. Les débats sont menés de l’extérieur, « sur » le Coran, et de l’intérieur, « dans » le Coran.

L’auteur présente rapidement les débats anciens internes à l’islam (chap. 1), dès les débuts de la conquête arabe lorsque circulent plusieurs « codex », jusqu’à l’établissement de la vulgate coranique, qui aurait eu lieu, selon la Tradition, à l’époque du calife ‘Othmân (644-656). Les recompositions tardives (IX^e siècle) des récits conservant les traces de ces controverses (chap. 3) sont des éléments essentiels à la recherche contemporaine. Celle-ci étudie le Coran comme un corpus d’écritures hétérogènes, un texte élaboré progressivement et le soumet à une analyse interne linguistique et littéraire (chap. 2), fragment par fragment. La cohésion de l’ensembleest assurée par la rhétorique et la thématique doctrinale.

La datation des manuscrits est essentielle pour examiner les données des compilations historiographiques ou religieuses anciennes (chap. 4).

L’auteur fait le bilan des recherches paléographiques et les confronte aux données fournies par des compilations, sur la collecte et sur ses acteurs (scribes, califes…).

À l’inverse, le dernier chapitre scrute à l’intérieur du Coran les polémiques dans lesquelles s’engage le locuteur du texteface aux contestations d’adversaires difficiles à identifier. Les débats internes portent sur la qualité du « Messager » qui se défend d’être poète ou voyant (kâhin) et sur les autres écrits (Torah, Évangiles, Psaumes).

En conclusion, l’auteur souligne l’immense difficulté qu’il y a à mener une étude critique du Coran.

Points forts

• Une présentation de l’« Écriture sainte » des musulmans qui suit les principes de la critique textuelle la plus rigoureuse, profondément différente de la présentation plus conforme à la Tradition, fréquemment reprise dans les ouvrages généraux sur l’islam en français et dans les manuels d’enseignement.

• Des exemples de « types de discours » récurrents (chap. 2) discernables dans le corpus : formules, proclamations de forme poétique et oratoire, hymnes, récitatifs évoquant les psaumes de la Bible hébraïque, récits, textes législatifs, discours de guerre ou textes de controverse.

• La notion d’akhbâr (p. 60-67), terme désignant un ensemble d’anecdotes, informations, récits, recueillis par les traditionnistes religieux (voir al-Bukhârî) et les historiographes musulmans. On trouvera des exemples de ces matériaux divers et contradictoires sur la collecte du Coran dans des compilations de la fin duVIII^e à la fin du IX^e siècles(p. 49-53).

• Pour les musulmans le Coran est Parole directe de Dieu, or il existe trois personnes grammaticales dans le Coran. L’auteur se demande « qui parle » ? : Dieu (« nous » ou « je ») ou le Messager, ou une tierce personne (« Il ») ? Ce procédé serait voulu par les « rédacteurs » pour entretenir une « confusion », favorable à un locuteur unique et tout puissant.

Utilisation possible dans les programmes scolaires