Sommaire

Résumé

Cet ouvrage collectif est composé des quatorze contributions du colloque « Genre, laïcité(s), religions » organisé à Paris en mai 2005. Les auteurs interrogent la laïcité dans la perspective du « genre », thématique sociale et politique abordée ici à la fois dans l’histoire (par un retour à la France de 1905 dans la première partie) et dans l’actualité (avec une deuxième partie comprenant plusieurs analyses de situation étrangère : Inde, Iran, Etats-Unis, Pologne, Allemagne).

La première partie revisite la période 1860-1914, « phase de laïcisation », sous l’angle inédit du genre, qui permet de mettre en lumière un « processus complexe de déprise et de remodelage de l’influence religieuse sur la société » : les acteurs de la laïcisation de l’éducation – la plupart sont des hommes –, qui œuvrent sur le terrain pour arracher l’éducation des filles des mains des congrégations, rencontrent une résistance catholique et féminine de grande ampleur. Dans ce contexte, il existe du côté laïque un débat sur le caractère prioritaire ou non de la laïcisation de l’éducation des filles. La République, plutôt rétive à la présence dans la sphère publique de femmes dont elle craint la soumission au « cléricalisme ennemi », conçoit l’éducation des filles en fonction de leur rôle de futures épouses républicaines, mères de républicains. Cependant, les mouvements laïques, notamment la Ligne de l’Enseignement, s’ouvrent à des formes de militances féministes, qui ont été décisives pour le progrès du droit des femmes. Vers 1910, le débat se concentre sur la morale laïque et la recherche d’une approche laïque de l’éducation à la sexualité.

Un siècle plus tard, la question du genre dans les débats sur la laïcité est souvent monopolisée par la question du « voile », question jugée encore trop passionnelle pour être abordée dans ce colloque. Dans le monde actuel, partisans des droits des femmes et représentants confessionnels s’opposent notamment dans les instances internationales, posant la question d’un avenir transnational de la notion de « laïcité », pourtant si difficile à traduire dans d’autres langues internationales. En Inde, où la « sécularité » est constitutionnelle, la question du « genre » et des droits des femmes est un révélateur des limites de la sécularisation. Dans ce pays, le régime inégalitaire actuel est revenu sur les avancées obtenues avant 1979, ce qui n’exclut pas la forte implication de femmes conservatrices dans le régime. En Europe, l’histoire récente de la Pologne et de l’Allemagne depuis la chute du communisme montre le poids des Églises dans le débat sur l’avortement. Aux États-Unis, la question du mariage homosexuel montre « la pertinence de la laïcité comme principe régulateur des liens entre le religieux, le politique et le social ».

Points forts

• L’ouvrage est novateur. Le thème du « genre » est l’un des axes porteurs de la sociologie actuelle. L’intérêt de cet ouvrage collectif est d’avoir saisi l’occasion du centenaire de la loi de 1905 pour introduire ce thème dans la réflexion sur la laïcité, de façon scientifique, et non comme un débat de plus sur « le voile ». L’approche choisie a aussi l’avantage d’aborder le thème d’un point de vue historique, par un retour sur l’œuvre de la IIIe République.

• Les contributions de la deuxième partie (actuelle et comparatiste) offrent des analyses sur des pays rarement présentés, notamment sur l’Inde, avec une étude éclairante sur « les droits des femmes, otages de la laïcité à l’indienne »

YB