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Décorations, fleurs, chocolats, messages d’amour, la Saint-Valentin est de nos jours une tradition bien ancrée.
Habilement placée entre les fêtes de fin d’année et la fête des mères, cette « fête des amoureux » peut apparaître au premier abord comme une commémoration religieuse s’étant transformée en événement commercial.
Qui était donc saint Valentin ? Comment a-t-il été associé à la fête de l’amour ?
À la fin de l’Antiquité, Valentin était un nom assez populaire, si bien qu’il existe de nombreux saints Valentin. Le 14 février célèbre la mémoire de deux d’entre eux : un prêtre de Rome martyrisé un 14 février sous l’empereur Claude II (règne 268-270) et un évêque d’Interamna (aujourd’hui Terni), martyrisé vers 273 à Rome sous l’empereur Aurélien (r. 270-275).
Même si les premiers martyrologes distinguent bien les deux Valentin, la rareté des informations les concernant, ainsi que leur proximité géographique et chronologique entrainent une confusion entre les deux. Le pape Gélase (r. 492-496) fixe ainsi la fête de saint Valentin au 14 février. À cette époque, il n’y a pas de procédure de canonisation : l’inscription au calendrier est d’abord une caution, la reconnaissance d’un culte populaire bien établi. Mais, lors de la révision du Calendrier romain en 1969, l’Église catholique décide de retirer la saint Valentin du calendrier faute d’informations fiables à son sujet — et le 14 février devient et reste aujourd’hui la fête de Cyrille et Méthode. Cependant, étant donné la popularité de saint Valentin, les Églises locales peuvent continuer de célébrer cette fête. Elle reste d’ailleurs inscrite dans les calendriers luthérien et anglican, et pour ces derniers, la liturgie prévoit la possibilité de renouveler ses vœux de mariage lors de la Saint-Valentin. Tandis que certaines Églises orthodoxes les commémorent le 6 juillet (Valentin de Rome) et le 30 juillet (Valentin de Terni).
Ainsi, le portrait de saint Valentin se construit progressivement. La version ancienne, rapportée par la Légende dorée (XIIIe siècle), montre un Valentin emprisonné condamné à mort après avoir failli convertir l’empereur Claude et qui, avant son exécution, rend la vue à la fille de son geôlier, Julie, aveugle de naissance. En effet, alors que Claude II avait interdit les mariages afin que plus d’hommes partent à la guerre, Valentin continuait de pratiquer des mariages et portait un anneau serti d’une pierre sur laquelle était gravé un Cupidon pour être reconnu par les intéressés. Après la guérison de Julie, il lui envoie un mot signé « ton Valentin », qui passe pour le premier billet de Saint-Valentin.
La Saint-Valentin comme fête de l’amour courtois est véritablement attestée au XIVe siècle. La première allusion se trouve chez Chaucer : dans Le parlement des oiseaux, où il fait de la Saint-Valentin le début de la saison des amours chez les oiseaux. La dimension religieuse de célébration du saint s’estompe, au point que certains auteurs folkloristes ont fait le lien avec les Lupercales, fête romaine de la fertilité célébrée le 15 février (la Saint-Valentin ne serait alors qu’un autre exemple de christianisation d’une fête païenne). Cependant, dans ce cas, il y a un laps de temps trop important entre la suppression des Lupercales par Gélase au Ve siècle et l’association de saint Valentin à l’amour au XIVe siècle ; de plus, la célébration des Lupercales, où les Luperques courent nus autour du Palatin en frappant de lanières, confectionnées avec les boucs sacrifiés, les femmes qu’ils rencontrent pour les rendre fertiles, rappelle plus les festivités carnavalesques que la glorification de l’amour courtois / romantique.
Véritablement née en Angleterre, la Saint-Valentin que l’on connaît aujourd’hui reste longtemps confinée à la sphère anglo-saxonne. Pourtant, au XIVe siècle, Othon de Grandson, un seigneur du Pays de Vaud au service des rois d’Angleterre puis des comtes de Savoie, fait connaître cette coutume sur le continent à travers sa poésie. Au XVe siècle, Charles d’Orléans, alors prisonnier à la Tour de Londres, écrit le plus ancien poème de Saint-Valentin conservé, dans lequel il évoque l’amour pour « sa Valentinée ». Mais malgré la popularité de ces poètes, la Saint-Valentin reste un phénomène anglais.
Jusqu’à nos jours, la popularité de cette fête ne s’est jamais démentie dans le monde anglo-saxon, en particulier aux États-Unis où, dans la seconde moitié de XIXe siècle, se développe toute une papeterie spécialisée liée à l’envoi des billets et cartes postales.
Il faut attendre la seconde moitié du XXe siècle pour que la Saint-Valentin se diffuse au reste du monde, avec parfois des adaptations locales, comme l’importance particulière du chocolat au Japon.
Cependant, cette diffusion peut rencontrer différents types de résistances locales :
• une opposition traditionaliste, qui y voit un vecteur d’américanisation / occidentalisation qui détruit les coutumes locales (Inde) ; parfois, une fête locale est remise à l’honneur pour contrer la Saint-Valentin (Sepandarmazgan en Iran, Dragobete en Roumanie) ;
• une opposition religieuse, qui considère qu’elle reste une fête chrétienne ; cela peut aller jusqu’à une interdiction locale ou nationale (Iran, Arabie saoudite, Pakistan) ;
• une opposition morale, qui y voit une incitation à des démonstrations publiques d’affection, voire à la sexualité hors mariage (Inde, Malaisie).
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Référence du document
« Rochette Renaud, Les origines de la Saint-Valentin » , 2017 , IESR - Institut d'étude des religions et de la laïcité , mis à jour le: 22/02/2017, URL : https://irel.ephe.psl.eu/ressources-pedagogiques/fiches-pedagogiques/origines-saint-valentin