PICAUDOU Nadine, L’islam entre religion et idéologie. Essai sur la modernité musulmane, Paris, Gallimard, 2010, 310 p.
Sommaire
Résumé
L’ouvrage L’islam entre religion et idéologie. Essai sur la modernité musulmane est une étude sur la redéfinition/la reformulation moderne du fait religieux et sa transformation en idéologie dans les contextes historiques, politiques et sociaux du Maghreb et du Moyen-Orient aux XIXe et XXe siècles. Il compte trois parties :
Dire l’islam analyse la refondation moderne du discours de l’islam, de la Tradition, de la Loi, face à l’opposition des docteurs conformistes de la scolastique et du savoir religieux institutionnalisé. L’auteure y expose certains réformistes précurseurs du monde musulman du XIXe siècle, tels que Sayyid Ahmad Khan et sa critique du contenu des hadîths, et al-Afghâni et sa mise en cause de l’inspiration divine de la prophétie (voir Islam. Avicenne, Averroès, Al-Ghazâlî, ibn Khaldoun. Les textes fondamentaux commentés de Catherine Golliau). Elle étudie les deux axes qui structurent l’enjeu de la modernité religieuse islamique et l’entreprise réformiste : la rationalisation du sens du message révélé et la relecture de la sunna.
Gouverner par l’islam examine le discours politique, la notion du pouvoir en islam, et notamment la transition de l’État dynastique à l’État moderne (voir L’islam et les fondements du pouvoir de Ali Abderrazik ; Islam et politique à l’âge classique de Makram Abbès). L’articulation entre islam et souveraineté, entre art de gouverner (siyâsa) et règne de la Loi divine (sharî‘a), y est observée à travers le « cas ottoman » (p. 110). En effet, au cours du XIXe siècle, les tanzîmât ont illustré cette modernité institutionnelle islamique. Ces réformes ottomanes consistaient désormais à repenser la philosophie même du pouvoir, en transformant les esclaves ou serviteurs du sultan en fonctionnaires civils et militaires de l’État, en professionnalisant l’administration et en spécialisant ses services, etc.
Mobiliser au nom de l’islam parle du processus de transformation de l’islam en idéologie et analyse l’émergence des communautés politiques modernes. Une transformation qui se caractérise souvent par la mobilisation des hommes, le djihâd… À partir du XIXe siècle, la démarche du djihâd en terre d’islam est plurielle : elle se déploie pour légitimer un pouvoir interne, de même que pour lutter contre une menace extérieure (voir Les fabriques du jihad de Jean-Luc Marret ; Généalogie de l’islamisme de Olivier Roy). Cette mobilisation des hommes accompagne une dynamique majeure de la réforme religieuse et du discours moderne : la montée du nationalisme contre la domination coloniale européenne (Maghreb, Moyen-Orient).
Points forts
-
La démarche de l’auteure qui évite la lecture « essentialiste » de l’islam et privilégie l’approche synchronique.
-
Une analyse épistémologique rigoureuse et une observation historique approfondie qui explorent les réformes islamiques modernes, et qui montrent la confrontation entre le fait religieux et le fait politique, ainsi que l’instrumentalisation politique du religieux en territoire musulman (XIXe-XXe siècles).
-
L’immensité de l’espace de l’étude qui concerne principalement le Maghreb et le Moyen-Orient mais s’étend, à travers des analyses croisées, à l’Iran, à l’Inde et à l’Asie centrale.
-
Une analyse des « pratiques » des djihâd modernes en fonction des espaces, des auteurs et des données de l’histoire.
AN
Gallimard
Domaines religieux : Islam, Islam : Doctrines et courants : Shi’isme, Islam : Doctrines et courants : Sunnisme, Islam : Origines et corpus : Hadith, Islam : Questions contemporaines
Guide des ressources : Recherche : Sciences des religions
Référence du document
Recension : « Picaudou Nadine, L’islam entre religion et idéologie » Gallimard, 2013, 310p., , IESR - Institut d'étude des religions et de la laïcité , mis à jour le: 12/16/2016, URL : https://irel.ephe.psl.eu/ressources-pedagogiques/comptes-rendus-ouvrages/lislam-entre-religion-ideologie