Sommaire

Résumé

Le retour possible des défunts n’a pas toujours été une donnée de croyance évidente à l’époque médiévale. Ce sont la chronologie et les modalités de l’« invasion » des revenants et, du même coup, des efforts menés pour les refouler, qu’en onze chapitres l’auteur entend étudier. L’une des caractéristiques de la culture ecclésiastique du haut Moyen Âge réside en effet dans le refus de ce qui est alors assimilé à une survivance du paganisme antique, d’autant que les revenants sont quasiment absents de la Bible et qu’une autorité comme Augustin cherche à bannir toute forme de culte matériel des défunts et toute communication entre les vivants et les morts. À partir du IX^e siècle, toutefois, les réticences sont écartées et les XI^e et XII^e siècles sont marqués par un développement des récits de revenants. Dans la plupart des cas, l’apparition a lieu lors d’un rêve, parfois à l’état de veille, et elle est souvent vécue comme annonciatrice du trépas imminent d’un proche. La fonction idéologique est claire, puisque les revenants sont mobilisés au service de la réforme de l’Église. À côté des récits à caractère autobiographique, ceux qui sont rapportés d’après un témoignage, en nombre plus important, insistent sur la nécessité des suffrages pour le salut de morts en danger du fait de leurs péchés. L’auteur présente les différents types de récits, qui d’une façon générale œuvrent à imposer une morale et des normes de comportement pour les puissants comme pour les humbles. Mais en outre, née du souvenir encore brûlant d’un être aimé trop tôt et trop soudainement disparu, la présence illusoire du revenant comble momentanément un vide et exprime le travail douloureux de la séparation, l’épreuve du deuil. L’auteur s’intéresse également au lieu de l’apparition d’un mort ou de la troupe des morts, qui peut-être l’endroit où le défunt a commis un délit, mais aussi la maison familiale ou le cimetière. Lorsqu’un revenant se donne à voir, c’est souvent sous les traits de l’être humain qu’il était au moment de sa mort, ou sous la forme d’un animal voire d’un objet matériel. Le vêtement n’est pas anodin, sa couleur rend compte du sort du trépassé dans l’au-delà et le cas échéant de son amélioration — lorsque le noir laisse place au blanc. L’iconographie permet à l’auteur de distinguer six types de figuration au XII^e siècle, avant que dans la seconde moitié du XIII^e siècle les revenants soient désormais présentés comme des vivants ou tels des fantômes, quasi-incorporels et translucides. À la fin du Moyen Âge apparaît une nouvelle formule, l’image macabre, qui tend à s’imposer.

Points forts

• Une étude sur le fonctionnement social de la mémoire des morts et sur le rapport intime des hommes du Moyen Âge avec la rupture (entre époux, entre parents et enfants, entre parents spirituels…) engendrée par la mort, mais aussi sur l’utilisation du récit, par l’Église, à des fins de normalisation des comportements. Au total, donc, une belle leçon de méthode.

• L’analyse iconographique, fenêtre sur les origines de tout un imaginaire collectif.

Utilisation possible dans les programmes scolaires

LV