Index des noms de personnes.
Sommaire
Résumé
L’ouvrage retrace l’histoire de l’islam et du culte musulman en France en trois parties :
L’islam en France, une présence séculaire
L’histoire de l’islam en France est marquée par l’année 1895 et par les trois grandes revendications qui symbolisent la reconnaissance d’une religion : la demande d’un lieu de culte, d’un centre d’enseignement et d’une nécropole. En 1895, des positivistes, tels Auguste Comte, P. Laffitte et le docteur Delbet, fondent à Paris le Collège libre des sciences sociales. La Revue de l’islam de Gaston Dujarric a pour objectif de diffuser des connaissances sans préjugés sur l’islam. En 1907, un groupe d’intellectuels musulmans de Paris crée la Fraternité musulmane, association définie comme « une société d’éducation et d’instruction islamiques » chargée aussi de « l’entraide et de la bienfaisance ». Par ailleurs, le séjour de l’émir Khaled, petit-fils de l’émir Abdelkader, à Paris, en 1924, cristallise les premières revendications de la communauté musulmane, immigrée et ouvrière, et la politisation de celle-ci. Khaled insistait sur le respect de l’islam et demandait à la France l’application de la loi de 1905 à cette religion. Jusqu’au milieu des années 1930, l’islam en France est un islam maraboutique tourné vers les confréries et le soufisme maghrébins et subsahariens. Aussi, l’Association des oulémas musulmans algériens ouvrent des nadis et des medersa qui diffusent une morale incitant à la réforme de la société. En 1952, le Centre culturel islamique de Paris est créé par des musulmans de toutes nationalités.
La France et ses sujets musulmans (1830-1947)
Dès la conquête de l’Algérie en 1830, la France promet le respect et la liberté du culte musulman, « quatrième culte reconnu » (p. 141). À partir de 1858, l’administration française d’Algérie assure l’entretien des édifices, la rémunération des « agents » du culte et la réorganisation des medersa en établissements bilingues (p. 146). Cependant, le gouvernement général de l’Algérie sélectionne les candidats au pèlerinage à La Mecque selon des critères politiques et décide de surveiller les confréries. De plus, la loi de séparation de 1905 n’est pas appliquée en Algérie. En 1924, le service des Affaires indigènes nord-africaines est créé par le conseil de Paris. Rattaché à la préfecture de police, ce service emploie vingt fonctionnaires de police et trente agents et inspecteurs de recherche responsables de la surveillance des civils « indigènes », et notamment des travailleurs militants anticolonialistes (p. 188). En France, le Parlement vote le financement de l’« Institut musulman de Paris » en 1920 (p. 180). L’« Institut », qui allait devenir la Mosquée de Paris, est inauguré en juillet 1926. En réalité, dès 1915, le général Lyautey, « commissaire résident général de la République au Maroc » aspirait à la création, par l’administration française au Maghreb, d’un califat occidental avec le sultan Moulay Youssef du Maroc à sa tête. Ce projet avait pour dessein d’affaiblir le prestige du calife ottoman allié de l’Allemagne lors de la Première Guerre mondiale. Ainsi, la construction d’une mosquée à Paris devait consacrer la « rupture » entre les sujets musulmans de la France et le califat d’Orient (p. 170).
La France et ses citoyens musulmans (1947-2004)
À Constantine, le congrès des oulémas approuve la création d’un Conseil supérieur de la religion musulmane, et vote une motion en faveur de la séparation du culte musulman et de l’État (1947). En outre, en 1951, l’Assemblée algérienne élit une commission spéciale du Culte musulman en vue de parvenir à l’indépendance du statut de l’islam. Mais, l’administration française établit les « pouvoirs spéciaux » et dote les militaires de moyens répressifs supplémentaires (Algérie, 1955-1956). Au demeurant, le culte musulman est géré en fonction des clauses d’exception stipulées par les « pouvoirs spéciaux ». Lors de la guerre d’Algérie (1954-1962), les Algériens nationalistes insurgés mènent contre la France un violent conflit coordonné par le Front de libération nationale (FLN).En France, dans les années 1980, le danger « intégriste » sert à justifier le refus de l’indépendance du culte musulman par le gouvernement français. Le Conseil français du culte musulman (CFCM) est créé en avril 2003, mais selon l’auteur il ne parvient pas encore à « s’affirmer en tant qu’autorité religieuse » (conclusion, p. 313).
Points forts
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Une étude historique et une analyse minutieuse de l’ensemble des événements politiques qui ont marqué l’assise de la religion musulmane en France1.
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Un examen critique de toutes les embûches et déconvenues rencontrées par les musulmans de France désireux d’accéder à l’indépendance de leur culte.
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L’apport du chapitre IV (p. 163-170), Le refus d’appliquer la loi de séparation (1905-1917). Selon l’article 43, la loi du 9 décembre 1905 devait s’appliquer en Algérie conformément à un amendement du sénateur d’Alger, Paul Gerente qui prévoyait l’application en Algérie de toutes les lois métropolitaines. Néanmoins, des restrictions sont introduites par le règlement d’administration publique du 27 septembre 1907, et la séparation de l’État et de l’islam n’a donc jamais été appliquée.
A. N.
1 Voir L’Islam en France de Alain Boyer [http://www.iesr.fr/index.html?id=3563].
Domaines religieux : Islam : Politique et société : Relations avec l’État, Islam : Questions contemporaines, Islam, Europe et religions : France, Europe et Religions
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Référence du document
Recension : « Nehmé Abd el Rahman, Sellam Sadek, SELLAM Sadek, La France et ses musulmans. Un siècle de politique musulmane 1895-2005, Paris, Fayard, 2006, 392 p » 2009, , IESR - Institut d'étude des religions et de la laïcité , mis à jour le: 12/16/2016, URL : https://irel.ephe.psl.eu/ressources-pedagogiques/comptes-rendus-ouvrages/sellam-sadek-france-ses-musulmans-siecle-politique