Sommaire

Résumé

Il n’existe pas de gestes « naturels », mais des usages sociaux du corps, propres à chaque civilisation et à chaque époque. Les étudier doit permettre de saisir les modèles culturels et les conceptions des rapports sociaux qu’ils exprimaient, afin de pénétrer au plus profond d’une société médiévale dans laquelle le paraître fondait l’être, et de cerner aussi comment cette dernière a tenté d’imposer aux gestes un ordre et un sens.

La démarche suit un fil chronologique en partant de l’Antiquité (chap. I : L’héritage antique), qui a jeté les bases d’une réflexion sur l’âme — en tant que principe de mouvement — et sur le geste en lien avec le développement de la rhétorique. Cette tradition s’est poursuivie durant les premiers siècles du christianisme. Du IV^e au VIII^e siècles, dans une société où l’Église affirmait son pouvoir, les gestes permirent d’élaborer des modèles de conduite pour lesquels la mesure (temperantia) et l’humilité (modestia) étaient essentielles (chap. II : Une religion du signe). Le geste était en outre le symbole d’une hiérarchie voulue par Dieu et qu’il fallait respecter. C’est dans les monastères que s’élabora la réflexion médiévale sur le corps, l’âme et les gestes, et c’est dans la Bible que furent trouvés les exemples de gestes à suivre. Lors de la « renaissance carolingienne », les modèles culturels furent renouvelés avec une idéologie impériale influencée par l’Antiquité et faisant une part à la réflexion sur les gestes, qui accompagna un important travail de codification liturgique. L’iconographie, quant à elle, met en exergue le rôle de la main, en particulier de la main de Dieu, titre du chapitre III qui fait en définitive ressortir l’insistance, aux IX^e-X^e siècles, sur l’idée de solennité plus que sur celle de mouvement. Aux XI^e-XII^e siècles, en revanche, le terme gestus revint en force dans les textes, qui nomment, décrivent et parfois condamnent les gestes avec une précision croissante (chap. IV : La distinction). Cela correspondit à un changement des pratiques sociales, dans un monde de plus en plus codifié. La réflexion ayant été avant tout le fait des hommes d’Église, l’auteur choisi de s’arrêter sur l’Institution des novices (De institutione novitiorum) d’Hugues de Saint-Victor (v. 1096 – 1141), dont un chapitre est consacré aux gestes (chap. V : La discipline des novices). Tandis qu’augmentait l’attention portée à ces derniers, une réflexion apparut également dans le monde des laïcs. L’auteur détaille plusieurs types de gestes qui ont fait l’objet de commentaires (chap. VI : Les laïcs et les clercs et chap. VII : Le langage des gestes) : gestes de l’adoubement et des funérailles, des femmes et de la table, gestes du Roi mais aussi du jongleur, en partie réhabilité. Enfin, l’auteur consacre les deux derniers chapitres de son ouvrage aux attitudes de prière (chap. VIII : De la prière à l’extase) et à l’efficacité symbolique (chap. IX), c’est-à-dire essentiellement aux gestes effectués lors des sacrements et en particulier de l’Eucharistie.

Points forts

• Dans l’optique de l’histoire du fait religieux, le chapitre VIII consacré à la prière, qui montre notamment comment ont triomphé les gestes devenus caractéristiques de la prière chrétienne occidentale.

• Le croisement de sources textuelles et iconographiques avec la démarche anthropologique, donc jamais déconnectée du présent : ainsi, au sujet de l’émergence, au XII^e siècle, de l’idée d’un « corps-machine » qui participa, selon l’auteur, au développement technologique de l’Europe en brisant les réticences si anciennes vis-à-vis des innovations.

Utilisation possible dans les programmes scolaires

LV