Traduit de l’italien [Erasmo in Italia, 1520-1580, Turin, 1987] par Pierre-Antoine Fabre. Bibliographie, index des noms de personnes et de lieux.
Sommaire
Résumé
L’A. se propose d’étudier la fortune et la réception d’Érasme en Italie à partir des sources inquisitoriales afin de « dessiner une convergence entre l’histoire de la réception italienne d’Érasme et l’histoire de la Réforme en général » (p. 11). Pour ce faire, le livre se propose de répondre à la question suivante : « comment le lecteur [italien] du xvie siècle lisait-il Érasme ? » (p. 19). En suivant les itinéraires de lecture et de réception de l’œuvre érasmienne en Italie, on se rend compte à quel point les cercles hétérodoxes se nourrissent de cette œuvre, en l’interprétant le plus souvent dans une optique luthérienne. Il existe par ailleurs un accord profond entre cette lecture et celle de ceux qui sont chargés de définir l’orthodoxie : pour les réformateurs italiens comme pour les juges de l’Inquisition, Érasme est un précurseur de Luther et ses écrits s’opposent aux croyances définies par l’Église latine. Cette figure d’un « Érasme luthérien » est une « construction de la théologie italienne entre 1520 et 1535 » (p. 39). Elle s’appuie sur l’insistance d’Érasme sur la liberté du chrétien (p. 103-128) en réaction à un ritualisme trouvé trop étroit par l’humaniste. Trouvant des relais dans le milieu des maîtres d’école (p. 129-152), qui utilisaient parfois des œuvres d’Érasme pour apprendre à lire à leurs élèves, l’érasmisme est aussi soutenu par certaines grandes familles. D’un point de vue doctrinal, ce sont les théories d’Érasme sur la miséricorde divine (p. 153-184) ainsi que sa défense de l’amour conjugal (p. 187-209) qui eurent le plus de succès en Italie dans les cercles hétérodoxes. Mais l’influence d’Érasme se fit également sentir par l’usage systématique du doute que firent les hérétiques italiens : il ne s’agit alors pas tant de nier que d’exprimer une incompréhension interrogative, méthode plus érasmienne que luthérienne.
Érasme, à partir des années 1550, subit une nouvelle vague d’attaques de la part des zelanti qui attaquent la théologie d’Érasme en la dénonçant comme hérétique et tentent de la faire condamner par la papauté. Le succès de ces derniers contre les spirituali, qui se réclamaient plus volontiers de l’œuvre du théologien, sonne le glas d’une réforme catholique érasmienne et humaniste. À partir de 1559, les voix défendant l’orthodoxie d’Érasme se font rares tandis que la mise à l’Index de la totalité de l’œuvre d’Érasme conduit l’Inquisition à considérer la lutte contre l’érasmisme et sa diffusion comme « un objectif prioritaire de l’activité inquisitoriale » (p. 336).
Après avoir dressé un bilan de l’exceptionnelle réception de l’œuvre d’Érasme dans les milieux notariaux, l’A. présente un tableau général de l’activité éditoriale italienne en ce domaine : nombreuses publications, certes, mais aussi relatif succès de la condamnation prononcée par le Saint-Office en 1559 et ayant conduit à un certain oubli de l’œuvre d’Érasme chez les théologiens postérieurs.
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Domaine : christianisme.
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Sous-domaines : Renaissance. Humanisme chrétien. Réforme et Contre-Réforme. Pratiques religieuses. Croyances. Théologie.
- Profil : Ouvrage spécialisé.
Points forts
- Un angle d’approche original : plutôt que de travailler sur la personnalité intellectuelle d’Érasme en lui-même (Erasmus ex Erasmo), l’A. présente une analyse de sa réception en Italie (Erasmus ex Erasmi lectore) ce qui « libère l’auditoire de l’auteur et lui confère autonomie et autorité interprétative » (p. 21). Ce choix permet de sortir de l’histoire intellectuelle, déjà bien balisée par l’historiographie, et de mettre en valeur la dimension sociale de la pensée, les réseaux par lesquels elle se répand et se transforme.
- Le même choix se retrouve dans l’analyse de l’hétérodoxie : prenant comme critère d’appartenance à la Réforme le fait d’être persécuté par l’institution ecclésiale (ce qui explique l’importance des sources inquisitoriales dans ce travail), l’A. propose une définition sociale de l’hérésie. Sont alors « religieusement déviants et orientés vers la Réforme » ceux qui eurent à souffrir « marginalisation sociale, douleur et destruction » (pp. 24-25) pour leurs idées religieuses.
- Une volonté de rendre compte de la diffusion de l’érasmisme et des hérésies dans toutes les couches de la société, depuis les hautes familles aristocratiques jusqu’aux classes sociales les plus populaires.
Utilisation possible dans les programmes scolaires
Classe |
Discipline |
Thème |
Primaire |
Histoire |
La Réforme, les guerres de Religion. |
Cinquième |
Histoire |
Les Réformes protestantes et catholiques |
Seconde |
Histoire |
Humanisme et Renaissance : Réformes protestantes et catholiques. |
Première |
Allemand |
Luther contre l’Église catholique. |
C.M.
Domaines religieux : Europe et religions : Italie, Christianisme : Période : Renaissance, Christianisme : Origines et corpus : Théologie, Christianisme : Période : Humanisme chrétien, Christianisme : Période : Réforme et Contre-Réforme
Guide des ressources : Recherche : Ouvrages
Référence du document
Recension : « Seidel-Menchi Silvana, SEIDEL MENCHI Silvana, Érasme hérétique, Réforme et Inquisition dans l’Italie du XVIe siècle, Paris, Gallimard / Le Seuil, Hautes Études, 1996, 444 p. » 2007, , IESR - Institut d'étude des religions et de la laïcité , mis à jour le: 12/16/2016, URL : https://irel.ephe.psl.eu/ressources-pedagogiques/comptes-rendus-ouvrages/seidel-menchi-silvana-erasme-heretique-reforme