Sommaire

Résumé

Empruntant à l’ethnologie sa définition, Gerd Theissen commence son livre en considérant que les « formes d’expression d’une religion » sont à la fois le mythe et la foi, le culte (les rites) et un ethos (des exigences éthiques). La suite de l’ouvrage reprend ces trois éléments. La première partie de son étude (« mythe et histoire dans le christianisme primitif ») montre comment le christianisme a infléchi le judaïsme qui reposait sur deux axiomes – monothéisme exclusif et Loi de l’Alliance – en conservant le monothéisme mais en transformant le second qui devient la foi en un sauveur, et donc en une personne. Cette personne replace « de façon nouvelle au centre du langage des signes religieux sa conviction fondamentale concernant le Dieu un et unique, en annonçant le règne de Dieu qui fait irruption » (p. 77). Theissen termine cette partie en montrant l’importance décisive de la résurrection de Jésus pour contribuer à la reconnaissance de sa divinité. La deuxième partie (« l’éthos du christianisme primitif ») montre que si le judaïsme entendait régler la totalité de la vie à l’aune de la Loi, le christianisme adopte une maxime plus radicale qui est l’amour absolu du prochain et le renoncement à tout statut social. Paradoxalement, ce radicalisme a conduit à une moindre rigueur cultuelle, puisque sont abandonnés les rituels de circoncision, les règles de pureté alimentaires, etc. La suite de cette deuxième partie envisage les nouveautés éthiques introduites par le christianisme, en fonction dans le domaine du pouvoir, de la richesse, de la sagesse et de la sainteté. Elle conclut sur le fait que ce bouleversement s’est fondé non sur une norme humaine mais sur l’agir divin qui change la puissance en faiblesse, la richesse en pauvreté, la sagesse en folie (p. 192). La troisième partie est consacrée aux rites. Theissen note avec finesse que si les nouveaux rites chrétiens (baptême, eucharistie) se détachent des rites de purification juifs en abandonnant la violence consistant à tuer un animal, puisqu’ils élèvent des actes quotidiens au rang de rites (se laver, manger), ils sont marqués par un accroissement de leur violence symbolique. Le baptême est compris comme une acceptation de la mort tandis que l’eucharistie commémore un sacrifice humain et pourrait être interprétée comme du cannibalisme puisque l’on consomme la chair et le sang de Jésus. Il conclut en affirmant que « la réduction de la violence dans l’effectuation du rite et l’accroissement de la violence dans l’imaginaire du rite sont en tension l’une avec l’autre ».

Les deux autres parties évaluent ces trois dimensions dans leur contexte socio-historique. La quatrième partie, « la religion chrétienne comme monde de signe autonome » décrit la clôture de l’univers symbolique chrétien. La cinquième partie, « les crises de consolidations du christianisme primitif » montre comment les différentes crises de croissance du christianisme l’ont renforcé : la crise des judaïsants consolide le rite, la crise gnostique consolide le mythe, la crise des prophètes consolide l’éthos. La crise de constitution du canon a définitivement affermi l’édifice en maintenant la pluralité des tendances par la pluralité des livres retenus.

• Domaine : christianisme

• Sous-domaines : Jésus, Naissance et diffusion du christianisme, Rapports avec le judaïsme.

• Profil : Ouvrage spécialisé

Points forts

Cet ouvrage un peu technique se révèle tout à fait remarquable par sa hauteur de vue qui embrasse toute l’histoire de la communauté primitive. Il permet de faire le pont avec l’ethnologie et l’anthropologie et de comprendre la nouveauté du christianisme ainsi que les raisons de son expansion rapide. Ses principaux points forts sont :

• L’originalité de la démarche qui s’inspire des sciences humaines ;
• La finesse des analyses qui aboutissent à quelques formules ramassées ;
• L’étendue des thèmes abordés.

Utilisation dans les programmes scolaires

R.B.